Justice pour le vivant – Notre Affaire à Tous et al. Contre Etat français

2200534/4-1
10 janvier 2022
Jugement définitif
France, Paris

ONG environnementales
Notre Affaire à Tous, Pollinis, Biodiversité sous nos pieds, Association nationale pour la protection des eaux et rivières Truite-Ombre-Saumon (Anper-Tos), Association pour la protection des animaux sauvages et du patrimoine naturel (ASPAS)
Etat
Emmanuel Daoud, Clément Capdebos, Sébastien Le Briero, Kleiman

Administratif
Tous
Condamner l’Etat à réparer le préjudice écologique causé par ses carences et insuffisances en matière d’évaluation des risques et d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, de réexamen des autorisations et de protection de la biodiversité contre les effets de ces produits et à mettre un terme à l’ensemble de ces carences et insuffisances.
Tribunal administratif de Paris, France

29 juin 2023
Positif
Il est enjoint à l’Etat de prendre toutes les mesures utiles de nature à réparer le préjudice écologique et prévenir l’aggravation des dommages en rétablissant la cohérence du rythme de diminution de l’utilisation des pesticides avec la trajectoire prévue par les plans Ecophyto et en prenant toutes mesures utiles en vue de restaurer et protéger les eaux souterraines contre les incidences des pesticides et en particulier contre les risques de pollution.
Non renseigné

Par un jugement du 29 juin 2023, le Tribunal administratif de Paris a reconnu l'existence d'un préjudice écologique. Ce préjudice écologique, dont il résulte la contamination généralisée, diffuse, chronique et durable des sols et des eaux, la diminution de la biodiversité et de la biomasse, et une atteinte aux bénéfices tirés par l’homme de l’environnement, découle du non-respect par l'Etat des objectifs de réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de la méconnaissance de son obligation de protection des eaux souterraines contre les incidences des produits phytopharmaceutiques.

Le Tribunal a donc enjoint la Première ministre et les ministres compétents de prendre toutes les mesures utiles de nature à réparer le préjudice écologique et prévenir l’aggravation des dommages en rétablissant la cohérence du rythme de diminution de l’utilisation des produits phytosanitaires avec la trajectoire prévue par les plans Ecophyto et en prenant toutes mesures utiles en vue de restaurer et protéger les eaux souterraines contre les incidences des produits phytopharmaceutiques et en particulier contre les risques de pollution. La réparation du préjudice devra être effective au 30 juin 2024, au plus tard.

Le Tribunal n'a toutefois pas ordonné à l'Etat de revoir les méthodologies d'évaluation des risques préalable à la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques suivies par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). En effet, s'il reconnait que les insuffisances dans les procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques doivent être regardées comme une carence fautive de l’Etat de nature à engager sa responsabilité, le préjudice écologique qui en découle n'est pas certain, dès lors que le résultat des études supplémentaires que pourrait exiger l’ANSES n’est pas connu à la date du présent jugement et qu’il ne peut donc en être inféré avec certitude que cela aurait pour effet de modifier significativement la nature ou le nombre des produits phytopharmaceutiques mis sur le marché.

Le 30 août, les associations requérantes ont déposé une requête sommaire d’appel en ce que l'arrêt n'a pas enjoint au gouvernement français de réviser le processus d'homologation des pesticides, alors que la Cour reconnaît expressément l'existence de failles importantes dans le système d'autorisation. Or, une évolution des méthodes d'évaluation des risques liés aux pesticides est indispensable pour atteindre les objectifs fixés par les plans Ecophyto. L'Etat français a lui aussi fait appel du jugement, ce qui témoigne le manque de volonté de la part du gouvernement d'actualiser sa méthode d'homologation. Notons que l'appel n'étant pas suspensif, l'Etat est donc tenu de se conformer à la décision du Tribunal administratif en prenant toutes les mesures nécessaires pour protéger efficacement les eaux souterraines et réduire l'utilisation des pesticides conformément aux plans Ecophyto,