Eaux européennes : des taux de pesticides supérieurs aux seuils de qualité

  15 décembre 2021

Le nouvel indicateur de l’Agence européenne pour l’environnement (AEE), publié le 9 décembre 2021 et qui vise à suivre les progrès de l’Europe en matière de réduction des pesticides dans les eaux, montre que des niveaux excessifs de pesticides ont été enregistrés dans une part considérable des eaux douces européennes.

Entre 2013 à 2019, un niveau de pesticides supérieur au seuil de qualité normalement acceptable a été détecté dans 13 à 30% des sites de surveillance des eaux de surface de différents pays européens. Ces dépassements sont principalement causés par les insecticides imidaclopride et malathion et par les herbicides MCPA, métolachlore et métazachlore pour les eaux de surface. Des dépassements d’un ou plusieurs pesticides ont été détectés dans 3 à 7 % des sites de surveillance des eaux souterraines. Il s’agit pour la majorité de dépassements par l’atrazine et ses métabolites. Cet herbicide est interdit d’utilisation, mais il est très persistant et continue de polluer les eaux encore aujourd’hui.

Les seuils de qualité sont fixés au niveau européen par la directive cadre sur l’eau de 2000 pour les pesticides dans les eaux de surface, et par la directive sur la protection des eaux souterraines de 2006 concernant ces dernières.

La majorité des données de l’indicateur de l’AEE sont issues de sites de surveillance localisés dans les pays ayant constaté la présence d’un grand nombre de pesticides dans leurs eaux. En effet, entre 2013 et 2019, sur 9 327 sites de surveillance ayant participé au contrôle des eaux au niveau européen, moins de dix d’entre eux provenaient d’Islande ou de Hongrie alors que plus de 1 000 sites se situaient en France ou en Italie.

La présence des pesticides dans les eaux de surface et les eaux souterraines est principalement due à l’utilisation de ces produits en agriculture intensive, générant une pollution massive des eaux.

Le nombre de pesticides signalés dans les eaux de surface ainsi que leur nature varient en fonction des pays. Ceux où l’on retrouve le plus de pesticides (plus de 100 substances détectées) sont l’Allemagne, la France, l’Italie et la République Tchèque. Concernant les eaux souterraines, le plus grand nombre de substances présentes a été signalé par la France (environ 215 types de pesticides relevés).

Concernant la France, les chiffres sont alarmants. Selon une étude publiée par l’Institut Français de l’environnement en décembre 2007 avec des données de 2005, près de 9 rivières sur 10 étaient contaminées par un ou plusieurs pesticides, et les résultats s’avèrent identiques pour la moitié des eaux souterraines. Selon les études menées par les divers sites de surveillance d’Europe en 2014, des pesticides ont été retrouvés dans 87% des points de mesure établis dans les cours d’eau et dans 73% des eaux souterraines, dépassant ainsi la norme « eau potable ». Cela s’explique par la forte activité agricole de la France et l’usage fréquent de ces substances par les agriculteurs.

La présence quasiment universelle des pesticides dans l’eau n’est pas acceptable. Elle entraîne des dégradations et des modifications des écosystèmes aquatiques, même lorsque leur concentration individuelle est inférieure aux taux réglementaires, car le fait d’avoir de nombreux types de pesticides présents entraîne un effet « cocktail », qui n’est aujourd’hui pas évalué.