Procureur de la république Contre 21 Faucheurs Volontaires

22-83.911
26 octobre 2016
Jugement définitif
France, Toulouse

Justice, Acteurs économiques
Procureur de la république de Foix, Espace Emeraude
ONG environnementales, Particulier
Guillaume Tumerelle

Pénal
Désobéissance civile
Herbicide, Glyphosate, Roundup
Condamner pour dégradation ou détérioration du bien d'autrui commise en réunion
Cour de cassation de Toulouse, France

29 mars 2023
Non renseigné
Rejette les pourvois

Dans un arrêt du 29 mars 2023, la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par les Faucheurs Volontaires Anti-OGM et les a condamné à 300 euros d'amende avec sursis chacun pour avoir dégradé des bidons de désherbants contenant du glyphosate appartenant à des magasins. Elle a ainsi confirmé l'arrêt de la Cour d'Appel de Toulouse du 31 mai 2022, qui annulait le jugement de relaxe prononcé en première instance par le Tribunal correctionnel de Foix.

En première instance, les prévenus avaient invoqué l’état de nécessité - cause exonératoire de responsabilité pénale - et le principe de précaution, en faisant valoir que leurs agissements avaient pour but d’alerter les magasins concernés et leur clientèle sur les dangers liés à la commercialisation, sans avertissements suffisants, de désherbants contenant du glyphosate, d’empêcher cette commercialisation et de protéger la santé publique ainsi que leur propre santé. Pour se prononcer sur le bien fondé de cet argument, le Tribunal correctionnel de Foix avait décidé de surseoir à statuer et de procéder à un renvoi préjudiciel sur la validité du règlement n°1107/2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques au regard du principe de précaution.

Une fois que l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne, répondant aux 4 questions préjudicielles, rendu le 1er octobre 2019 (C-616/17), le Tribunal de Foix s'est prononcée le 1er juin 2021 sur le fond de l'affaire. Il a considéré que les conditions requises pour se prévaloir de l'état de nécessité, à savoir : - un acte nécessaire et proportionnée à la sauvegarde de la personne ou du bien ; - face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, CF article 122-7 du Code Pénal, étaient réunies. C'est notamment à partir de l'arrêt du 1er octobre 2019, dont "il est possible de déduire la sous-évaluation des risques de certains produits en l'absence de prise en compte de l'effet cocktail" (p.21), que le tribunal a en effet reconnu l'existence d'un tel danger. Il a par ailleurs considéré que l'action était bien nécessaire pour informer la population et les responsables des magasins en cause et proportionnée.

Toutefois, selon la Cour de cassation, la commission d'une telle infraction n'était pas le seul moyen d'éviter un péril actuel ou imminent, les prévenus ayant accès à de nombreux moyens d'action, politiques, militants, institutionnels qui existent dans tout Etat démocratique. La Cour de cassation confirme donc l'arrêt infirmatif d'appel, au motif que l'acte n'était ni nécessaire ni proportionnée. On peut souligner qu'elle ne s'est donc pas prononcée sur l'existence même du danger, mise en lumière par la décision de première instance.

C’est sur cet arrêt de la CJUE que se fonde la plainte déposée par la coalition d’associations “Secrets Toxiques” (N°2000084).